Séjour à Avignon – Partie 2 (19/12/2022)

Aujourd’hui c’est local. Je vais visiter en solo une partie de la ville. Ci-dessous la carte de mes pérégrinations (en orange la virée diurne, en bleu la virée nocturne).
Si vous souhaitez suivre l’itinéraire sur la carte séparée sur Géoportail, vous pouvez l’afficher dans un onglet séparé ici.

Je débute en partant vers les remparts sud et la porte Saint-Michel.

Avignon a connu plusieurs séries de remparts. Ceux datant de la colonisation romaine au Ier siècle. Au XIIe siècle les remparts furent renforcés. Au XIIIe siècle, lors de la révolte des Albigeois, la ville avait pris le parti du Comte Raymond VIII de Toulouse qui les soutenait. Assiégée et prise par les troupes du roi de France Louis VIII, les murs furent abattus, les fossés comblés avec interdiction de reconstruction pendant 5 ans.

Les actuels remparts datent du XIVe et furent construits de 1357 à 1373 à l’instigation de Clement VI (demande faite à Juan Fernandez de Heredia en 1349) pour protéger la ville des Grandes Compagnies (troupes de mercenaires sans emploi pendant les périodes de paix). Ces remparts atteignaient huit mètres de haut, étaient entourés d’un fossé d’une profondeur d’environ quatre mètres alimenté par les eaux de la Sorgue et de la Durançole. L’enceinte mesurait de 4 330 mètres de long, enserrait les faubourgs et de nombreux espaces agricoles. Elle comportait de 12 portes, 36 tours quadrangulaires et 56 échauguettes.

Je ne reste pas hors les murs et replonge dans la vieille ville et ses petites rues.

Je passe devant le temple Saint-Martial.

Ce palais fut construit à partir de 1346 pour la reine Jeanne Ire de Naples qui n’y viendra qu’une fois en 1348. En 1362 le pape Urbain V le donna au cardinal de la Roche, abbé de Cluny en compensation du prieuré Notre-Dame de Belvédère à Sorgues qui avait été annexé par le pape Jean XXII. Le Cardinal de la Roche en fit sa première Livrée cardinalice avant de de s’installer dans celle d’Annibal de Ceccano (devenue aujourd’hui la bibliothèque municipale d’Avignon). Il fut transformé en prieuré puis en collège bénédictin aux XIV et XVe siècles.
Après la Révolution, désaffecté il fut transformé en Musée d’Histoire Naturelle où se tinrent des cours municipaux réputés.
L’église fut donnée affectée au culte réformé en 1881.

Je me retrouve sur l’avenue de la République. La grande artère commerçante où se trouvent toutes les boutiques des marques habituelles que l’on rencontre partout. Pas mal de monde. Je passe devant l’ancienne chapelle du collège des Jésuites devenue le Musée Lapidaire qui héberge la collection archéologique de la Fondation Calvet.

Poursuivant la promenade le nez en l’air, je passe par la rue du Prévôt. Un grand bâtiment attire mon oeil. Je ne le sais pas (je découvrirai ça plus tard en faisant quelques recherches) mais il s’agit de l’ancienne Livrée cardinalice d’Annibal de Ceccano devenue la bibliothèque municipale. A posteriori je regrette de de ne pas avoir poussé plus avant à cet endroit.

Finalement je me retrouve place Saint-Didier avec l’église qui donne son nom à l’endroit.

Depuis ses hauteurs, un spectateur regarde les allées et venues des humains avec un certain recul…

Le ciel est chargé. Quelques coins de ciel bleu apparaissent ça et là mais ne coïncident pas avec le soleil. Donc peu ou pas d’éclaircies au programme. On fera sans ! Je me dirige donc vers la Place du Palais, visitée hier en nocturne. Passage par la Place de l’Horloge et son manège à demeure.

La palais est toujours aussi massif et impressionnant de jour. Une véritable citadelle.

La Place n’a acquis son aspect actuel qu’au fil de temps.
Pendant le Grand Schisme d’Occident, lors du siège de 1404 les habitations au pourtour du palais sont rasées pour faire un glacis.
Au XVIIe siècle la place est encore très accidentée et arborée. Une allée de muriers conduit au Petit Palais. Au XVIIIe la plateforme devant la cathédrale est élargie, des rampes sont aménagées et l’escalier refait. Ce n’est qu’en 1858 que l’espace est aplani et pavé.

A cette heure l’accès au Rocher des Doms est ouvert. J’emprunte la rampe qui y mène.

Cet éperon rocheux fut habité dès le néolithique. Pendant le haut Moyen-Age la ville d’Avignon était uniquement cantonnée à cette zone et sur ses pentes. La partie sud a vu finalement l’édification du palais pontifical au XIVe siècle. Le nord a longtemps été délaissé, abritant quelques moulins et servant de lieu de pacage aux moutons. Ci-dessous le plan dit « Plan aux personnages » datant de 1572 montrant la ville en vue cavalière. Le détail (2e image) montre au nord du palais la zone des moulins et le pont d’Avignon en entier.

Je passe à côté de Notre-Dame des Doms. En 1859, une statue de la Vierge Marie en plomb dorée y fut installée.

En montant la ville se dévoile, avec une vue sur la face nord de Notre-Dame des Doms et une des tours du palais (la tour de Trouillas) située au nord-est.

Au passage, voici une oeuvre qui je crois ne doit rien aux papes de l’époque…

Du côté Est du rocher le panorama s’ouvre sur un bras du Rhône. Au premier plan naturellement se trouve le pont Saint-Bénézet (le fameux « Pont d’Avignon »… sur lequel nous n’avons pas dansé 😉 ). Juste derrière se trouve l’Ile de la Barthelasse, poumon vert de la ville (9,8 km²) sur laquelle passait le célèbre pont. Sur les deux premières photos on distingue une tour située sur l’autre rive (au-delà de l’île). Il s’agit de la Tour Philippe Le Bel qui terminait le pont côté français sur la rive droite. Il faut se souvenir qu’Avignon faisait partie des états pontificaux et que le Rhône était la frontière avec le Royaume de France (Avignon ne sera réintégrée à la France qu’après la Révolution).

Un peu au sud se trouve le Fort Saint-André, forteresse voulue par Philippe le Bel pour faire face au Saint-Empire Romain Germanique.

En vertu d’un accord conclu en 1226 entre Louis VIII et l’abbé de Saint-André, Philippe-le-Bel signe l’acte de fondation de Villeneuve-lès-Avignon en 1292 et la tour (qui porte son nom) est construite sur le site même de l’abbaye dominicaine entre 1300 et 1307. C’est Jean II Le Bon qui fera fortifier la partie haute, le Mont-Andaon, et ériger la forteresse.
Le rattachement de la Provence à le France en 1481 rendra cet édifice inutile sur le plan stratégique et il deviendra une place forte militaire.

Au centre du Rocher se trouve le Jardins des Doms. Il s’agit d’un jardin à l’anglaise de 3ha créé au XIXe siècle avec son vignoble (visible sur la série offrant la vue vers l’est). Des réservoirs d’eau sont mis en place, un bassin et une grotte artificielle sont créés, des statues de personnalités locales installées.

Depuis l’esplanade, les points de vue embrassent les environs sur 270°.

Au bout du jardin, j’emprunte l’escalier qui amène en bordure du Rhône. Vus d’en bas, les 30m de haut du rocher sont abrupts. Pas étonnants que les premiers habitants y aient placé leurs maison : plus facile à défendre et on voit loin…
Le pont d’Avignon n’est pas loin…

Longeant le fleuve en direction du pont, je passe devant la Porte du Rocher. Percée en 1974 sous le Rocher des Doms, c’est la dernière née des portes.

Je tente d’accéder au pont. Pour 1 min j’arrive trop tard…
Ce fameux pont qui se nomme Pont Saint-Bénézet possède une longue et chaotique histoire. Double qui plus est en ce qui concerne sa création !

La légendaire : Un jeune berger ardéchois de Buzet de 12 ans, Bénézet (Benoit) reçut l’ordre divin d’aller construire un pont à Avignon. »Bénezet prend ta houlette, descends à Avignon, la capitale sur l’eau, parle aux habitants et fais y construire un pont ». Quand il annonça la parole divine sur la future place du palais il fut moqué et raillé. Le prélat demanda donc à Bénezet de prendre un rocher et de le jeter dans la rivière. Au moment de s’approcher du rocher, deux anges appararurent et l’aidèrent à le jeter dans le Rhône. Ce fut la première pierre de l’édifice.

La véritable histoire est (forcément) différente. Bénézet aurait fondé une œuvre charitable pour construire, entretenir le pont et aussi aider les voyageurs avec des frères laïcs. Il mourra en 1184 avant de voir le pont achevé. Il est appelé Saint, alors qu’aucun procès en béatification ne soit ouvert. La chapelle basse du deuxième pilier renfermaient ses reliques avant leur transfert en 1674 à l’église de la place des Corps Saints.

Le pont Saint Bénezet aurait été, selon les historiens, en travaux permanents entre le XIIe et le XVIe siècle.Sa construction débuta en 1177 et se serait achevée en 1185 (selon la légende) ou 1293 (selon les historiens). Durant cette période, l’édification du pont se faisait en été lorsque le niveau des eaux était le plus bas. Les ouvriers (une centaine) construisaient un à deux piliers du pont par an.
Long de 920 mètres, il comportait 22 arches et mesurait 4 mètres de large. L’étroitesse du pont contredit la célèbre chanson: « sur le pont d’Avignon » on ne pouvait pas y « danser en rond », il semble pourtant que l’on ait dansé sous le pont, lorsqu’une auberge s’était établie sur l’île de la Barthelasse, au pied d’une arche isolée. Il est probable qu’il n’ait jamais été totalement terminé conservant des portions en bois.
Il fut longtemps le seul pont permettant de traverser le Rhône entre Lyon et la Méditerranée, son utilisation était pourtant bien spécifique. Trop étroit pour permettre aux charrettes de se croiser, il n’a jamais pu être utilisé à de pures fins commerciales, le transport de marchandises se faisant par barque ou par barge. En revanche, il permettait de contrôler efficacement le trafic et prélever les droits de péage, conformément au rôle de poste-frontière entre l’État pontifical et le Royaume de France qui lui était dévolu.
Endommagé tant par les crues que par les guerres, l’ouvrage fut reconstruit plusieurs fois.

• Entre 1234 (après le siège d’Avignon par Louis VIII) et 1237.
• En 1479, à cause des inondations, deux arches furent entièrement détruites. Le roi de France Louis XI ordonna sa réparation par lettre patente royale datée du 10 octobre.
• En 1603 suite de la modification du lit du fleuve à l’époque du petit âge glaciaire, une première arche s’effondre en 1603, ensuite trois autres en 1605. Les quatre sont rebâties vers 1628.
• En 1633, juste après la réouverture du pont, deux nouvelles arches s’effondrent.
• En 1669, une nouvelle crue du Rhône emporta plusieurs autres arches pour ne laisser pratiquement que celles qu’on lui connaît de nos jours.

Je me contente donc de quelques photos d’en bas.

Une reconstitution 3D du CNRS donne une bonne idée de ce qu’il aurait été.

Je me retrouve finalement hors les murs, enfin hors des remparts. Je vais donc un peu longer le Rhône avant de revenir dans la ville.

Je rentre par le Passage de l’Oratoire et peu après c’est la Collégiale Saint-Agricol (non, je n’ai pas omis le ‘e’).

Saint Agricol, évêque d’Avignon entre 660 et 700, aurait fait ériger une église à cet emplacement. Des fouilles ont d’ailleurs mis au jour des sépultures de cette époque. Après les ravages des Sarrasins, l’église est rebâtie par l’évêque Foulques II. En 1321, le pape Jean XXII l’érige en collégiale, et finance une partie des travaux d’agrandissement. De nombreux travaux aménagement furent réalisés au XVe siècle : nef allongée, construction de la façade actuelle, construction du parvis et de l’escalier.

A l’intérieur se trouve une crèche provençale du XIXe siècle (avec les explications des personnages sur la dernière diapo de la série.

A quelques mètre de la Collégiale se trouve, derrière une devanture de bâtiments du XIXe siècle, la chapelle des Templiers. Dernier signe de la présence de l’Ordre installé dans la ville à partie du XIIe siècle. Si j’ai compris elle semble utilisée par le théâtre Le Petit Louvre.
Inaccessible. Dommage…
Cela marque la fin de ma balade diurne.

Le soir je repars pour une balade de nuit pour voir pont d’Avignon s’il est éclairé. Un réflexe de parisien ? Un regard vers le clocher de l’église des Pénitents Blancs.

Je repasse devant la Collégiale Sant-Agricol, qui est illuminée. De bonne augure ?

Je vais traverser les remparts en repassant par le Passage de l’Oratoire. La chapelle de l’Oratoire, dont l’édification a débuté en 1714 ne fut consacrée qu’en 1750.
Forcément à cette heure tardive (il est plus de 20h) je ne peut y pénétrer.

Fin du suspense, le pont est dans le noir. Dommage. Suis-je arrivé trop tard ? Le pont est-il habituellement illuminé ? Je ne sais. Tant pis ! Je rebrousse chemin en revenant cette fois par la Porte de l’Oulle. Les remparts eux sont bien éclairés. Et c’est du plus bel effet !

Juste après se trouve la Place Crillon. Le bâtiment de l’ancienne Comédie d’Avignon trône sur la place. Ce fut la première salle de la ville spécialement destinée à au spectacle. Inaugurée en 1732 et utilisée jusqu’en 1824, c’tait un théâtre à l’italienne. elle fut remplacée par une nouvelle salle plus spacieuse place de l’Horloge en 1825. C’est devenu un local commercial.

Ensuite c’est retour maison car demain c’est le Palais des Papes !