Séjour à Avignon – Partie 3 (20/12/2022)

Aujourd’hui, on visite le Palais de Papes. J’ai réservé en ligne au plus tôt, c’est-à-dire 10h. Ce n’est pas vraiment les matines ! Bon, un très court rappel du pourquoi les papes se sont retrouvés à Avignon pendant plus de 70 ans.

La papauté siège officiellement à Rome mais en réalité en cette période moyen-âgeuse le souverain pontife et sa cour sont itinérants, le pape se déplaçant et résidant dans ses états. De plus la péninsule italienne est en proie à d’importants troubles et conflits.
La succession au trône du Saint Empire romain germanique y a entrainé d’importants troubles (pour vous rafraichir Saint Empire et guelfes et gibelins).
Le Royaume de France mené par Philippe le Bel est maintenant une très imposante force militaire. Son opposition au pape Boniface VIII depuis 1295 a également tendu la situation. L’expédition punitive menée en 1303 par Guillaume de Nogaret (futur Garde des Sceaux du roi) en Italie montre sa puissance et sa détermination.

La succession de Boniface VIII, disparu en octobre 1303, s’est faite sous tension et le nouveau pape Benoit XI annula la plupart des mesures antifrançaises prises par son prédécesseur. Il meurt rapidement en 1304. Les difficiles tractations pour nommer un nouveau pape durèrent 11 mois pour finalement élire (avec le soutien de Philippe le Bel) le français Bertrand de Got en 1305 au conclave de Pérouse. Il prend le nom de Clément V et compte tenu de la situation en Italie se fait couronner en terre d’Empire, à Lyon. Un long périple dans le royaume de France et en Guyenne (anglaise) (Clément V était avant son élection archevêque de Bordeaux) se terminera dans le Comtat Venaissin, terre vaticane depuis 1274. Il ne siégea jamais à Avignon mais une partie du Sacré Collège des évêques commença à s’y installer. Avignon située hors du Comtat, était propriété du Roi de Naples et Comte de Provence, donc vassal du pape et partie du Saint-Empire. Clément V dissoudra l’Ordre du Temple sous la pression royale française officiellement le 22 mars 1312 lors du concile de Vienne (concile réclamé instamment par Philippe le Bel, les Templiers ayant déjà été arrêtés sur son ordre le vendredi 13 octobre 1307).

En 1314 au décès de Clément V les négociations vont trainer en longueur. Ce n’est qu’en aout 1316 que Jacques Duèze, archevêque d’Avignon, est élu et prend le nom de Jean XXII. Il a 72 ans et passe pour un pape de transition. Erreur… Il vivra encore 18 ans ! C’est lui qui installa véritablement la papauté à Avignon. La ville, située en terre d’Empire, se trouvait sur le Rhône, axe fluvial majeur nord-sud et son pont était le seul entre la Méditerranée et Lyon. Le fleuve constituait la frontière avec le Royaume de France. Jean XXII s’installe dans la demeure épiscopale d’alors, qu’il fait largement modifier et transformer.

Jean XXII mourut à 90 ans en décembre 1334. Jacques Fournier, évêque de Pamiers fut couronné sous le nom de Benoit XII dans l’église des dominicains d’Avignon le 8 janvier 1335. Il fit largement modifier, agrandir et fortifier le premier palais, avant tout pour se prémunir d’une intervention armée de Louis de Bavière sur le trône du Saint-Empire et allié de l’Angleterre avec les relations étaient mauvaises (Avignon était en terre d’Empire). Son successeur Clément VI agrandira encore et massivement l’ensemble en faisant construire le « Palais Neuf ». Un aperçu 3D sur le site de Palais des Papes.
De plus Clément VI acheta Avignon à la Reine Jeanne I^ère de Naples pour 80000 florins, sortant ainsi du Saint Empire dont dépendait directement la reine de Naples.

On pénètre par la cour d’Honneur. Nous sommes peu de visiteurs à cette heure et c’est tant mieux. A l’accueil nous avons pris nos « Histopads », tablettes géolocalisées permettant de voir en réalité augmentée certaines salles. Nous nous rendrons compte que c’est plutôt très réussi (à part quelques ratés de localisation peu gênants au final).

Les murs fortifiés du palais vieux sont étonnants alors qu’on se trouve déjà dans l’enceinte.
Je ne vous ferai pas un compte rendu exhaustif de la visite.

Une fois passée la Salle des Audiences, nous sortons dans les jardins construits sous Urbain V (successeur de Clément VI) en 1362.

Parmi les salles visitées et autorisées à la photographie (j’ai respecté les interdictions malgré le flash désactivé sur le téléphone), il y a le Grand Tinel. Immense salle de 48 m de long sur 10 de large où se tenaient les réception et les banquets.

La Chapelle Saint Martial qui fut peinte par Matteo Giovanetti entre 1344 et 1345 donne sur le Grand Tinel. Photographie interdite. Donc je vous insère une image trouvée sur Wikipredia.

Les cuisines (dans la tour des cuisines) jouxte le Grand Tinel. Sa cheminée de 18 m de haut et la superficie de la pièce laisse imaginer ce que l’on pouvait y cuire. La réalité augmentée de l’Histopad fait aussi des merveilles à cet endroit.

Nous allons passer dans plusieurs pièces Chambre du Parement, le Studium (le « bureau »), la chambre du pape (et sa fresque), où les photos sont interdites. Donc je me suis abstenu…

Au passage, au mur les armes de Philippe d’Alençon dont je vous invite à lire l’article Wikipedia ici.

Peu avant d’entrer dans la Grande Chapelle on traverse la sacristie (nord) où se trouve une superbe grande fresque sculptée (2,5 m x 2,5 m): Le Retable du Portement de la Croix. C’est une copie (moulage en plâtre peint) de l’original commandé en 1478 par le roi René à Francesco Laurana, pour orner le maître-autel de l’église du couvent des Célestins. Le retable en marbre polychrome se trouve depuis 1850 à l’église St-Didier.

La Grande Chapelle fait partie du Palais Neuf, construite sous Clément VI. 52m de long, 20 de haut et 15 de large. Une grande chapelle effectivement. Elle était très dénudée à notre passage, une exposition venant d’être démontée.

On sort (ou on entre…) de la Grande Chapelle par le magnifique portail a beaucoup souffert à la Révolution.

Une fois le portail franchi on se trouve sur le parvis face à La Fenêtre de l’Indulgence : c’est ici qu’était prononcé le fameux « Habemus papam » et qu’ensuite le nouveau pape donnait sa bénédiction au peuple et distribuait les indulgences. Cette fenêtre fut détruite au XIXe siècle, le palais étant devenu une caserne militaire. Elle fut reconstruite vers 1910 suivant des dessins de l’époque.

Nous montons au sommet de la Tour de la Gâche. Nous avons une vue plongeante sur la cour d’honneur traversée au début de la visite.

Nous empruntons le chemin situé au-dessus de l’Aile des Dignitaire, en passant derrière le sommet des 2 tours situées au-dessus de l’entrée principale du palais sur la place.

Nous parvenons sur l’esplanade située en haut de la tour d’angle. Pour vous situer, voyez les photos annotées ci-dessous :

La vue est superbe. La place du Palais est à nos pieds l’Hôtel Cavet de la Palun à gauche, Hôtel des Monnaies à droite La tour de l’Horloge (mairie) est au fond.

Petit panoramique sur la Place du Palais…

Avant de redescendre, une dernière série sur les tours et la ville

Revenant sur nos pas (et marches) nous revenons devant l’entrée de la Grande Chapelle pour emprunter l’Escalier d’Honneur (qui avait été rénové en l’honneur de la visite de Louis XIV) comme en atteste la plaque commémorative.Large et bien éclairé il contraste avec les autres passages étroits du palais.

Nous atteignons la Grande Audience. Cette salle est située juste en dessous de la Grande Chapelle.

C’est le chef d’oeuvre de Jean de Louvres, l’architecte de Clément VI. 52 mètres de long sur 16,80 mètres de large et 11 mètres de haut. Elle est séparée en 2 Nefs par 5 piliers qui reçoivent les retombées des croisées d’ogives. Coté mur, les nervures s’appuient sur des culots sculptés représentant des figures de bestiaire d’une grande qualité artistique.

La Grande Audience accueillait le Tribunal des Causes Apostoliques, organe judiciaire permanent et sans appel, organisé en un collège d’Auditeurs. A partir de 1336, il fut appelé Tribunal de la Rote, du latin rota qui signifie roue, à cause de la banquette circulaire où siègent ses membres. Une barrière les séparait du reste de la salle.
Le tribunal siègeait dans la travée Est où les clés de voûtes portent les armes de Clément VI et celles de Rome, S.P.Q.R.(« Le Sénat et le peuple de Rome ») rappelant l’origine Romaine du Pontife et de son administration. Un immense Jugement Dernier, aujourd’hui disparu, ornait la paroi Nord. Ce thème iconographique était directement lié à la fonction du lieu et souligne l’infaillibilité du tribunal.

Dans la travée Est subsiste le décor de l’arc peint par Matteo Giovannetti, représentant 18 Prophètes de l’Ancien Testament. Un autre décor, également détruit au XIXème siècle représentait un Calvaire.

Vue vers l’extrémité ouest

Une fois ressortis nous allons rentrer déjeuner. Les visites, ça creuse ! Au passage quelques allusions peintes au festival…

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En fin d’après-midi nous ressortons nous promener un peu. Nous voici au Square Agricol Perdiguier qui jouxte le temple Saint-Martial évoqué dans la promenade d’hier. Ancien jardin et cloître de l’abbaye bénédictine Saint Martial au Moyen-Age, désaffecté après la Révolution, il est devenu un jardin botanique au tout début du XIXe siècle sous l’impulsion d’Esprit Requien, botaniste. Amputé de la moitié de sa surface ar le percement du cour Jean Jaurès au milieu du XIXe siècle, il est réaménagé en jardin public en 1991. La cabine téléphonique anglaise est un cadeau de la ville de Colchester avec laquelle est jumelée Avignon

Les rues sont animées à cette heure.

Nous arrivons place des Corps Saints où se trouve l’ancienne église du couvent des Célestin et l’ancien cloitre, ravagés à la Révolution.

Dans l’église se trouve une grande crèche (en plus des marchands de santons etc…)

Un dégourdissage de pattes du soir ne fera qu’une mièvre moisson de clichés. Mais je serais curieux de savoir ce q’un collège moderne de jeunes filles peut enseigner ! Je n’ai rien trouvé à son sujet sur internet dans mes recherches hormis cet article assez drôle dont je ne sais pas s’il s’y rapporte…

Après cette journée culturelle, demain on roule !